Recherches collaboratives impliquant des disciplines de sciences humaines et sociales : Focus sur la collaboration des chercheurs et des journalistes

Dans le cadre de l’aboutissement du projet PLACES, financé par le Ministère de la Culture, qui a porté sur les collaborations entre journalistes et chercheur.e.s en SHS, et coordonné par Alessia Smaniotto (Twitter @selasia, OpenEdition) et Pierre Mounier (identifiant ORCID, EHESS, OpenEdition), SupDPO a participé le 29 janvier 2021 à la table ronde organisée sur Les recherches collaboratives et les défis du partage des données.

La-dîte table ronde a réfléchi aux possibilités – et aux conditions – du partage de données de recherche dans le cadre de recherches collaboratives interprofessionnelles, pouvant relever de la science citoyenne.

La possibilité de partager les données recueillies sur le terrain entre les enquêteurs impliqués, qu’ils soient chercheur.e.s ou journalistes, semble à première vue relever d’une évidence pratique autant que méthodologique. Cependant, un tel partage se heurte aux exigences du “secret des sources”, de la “confidentialités des informateurs” et du cadre légal du RGPD. Est-il alors seulement possible d’enquêter à plusieurs ? Quels en sont les enjeux ? Quelles solutions existent à ce jour ?

Soulignant d’abord les convergences entre les besoins de protection des données des métiers d’investigation journalistique et de recherche au regard du RGPD, SupDPO a interrogé les procédures existantes entre journalistes et chercheurs en la matière, expliquant que le RGPD permet plutôt qu’il ne limite, en témoigne son appelation juridique exacte : « Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données« . Si l’intérêt du partage de données dans le cadre des collaborations n’a fait aucun doute, des échanges ont aussi porté sur les distinctions fonctionnelles et de pratiques des différents métiers : secret des sources pour les uns, science ouverte pour les autres. Les corpus juridiques spécifiques – par exemple la Charte européenne des devoirs et des droits des journalistes de 1971 et le Code de conduite européen pour l’intégrité en recherche révisé- témoignent de ces porosités et différences et les DPO accompagnant ces métiers doivent y être sensibles.

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SupDPO a appuyé la nécessité et l’intérêt de tous de prévoir en amont de la collecte de données :

  • l’information préalable et le consentement des sujets de recherche, avec les modèles proposés par le DPO de son organisme, de telle sorte qu’ils soient conformes par défaut et s’adaptent nativement aux besoins de réutilisation ultérieure,
  • l’anonymisation/pseudonymisation,
  • et plus largement de mettre en oeuvre toutes les mesures techniques et organisationnelles déclinées par les établissements.

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Il a été rappelé qu’une base de donnée anonymisée définitivement n’est plus un traitement de données à caractère personnel et que ces travaux doivent être menés en s’interrogeant sur la valeur scientifique patrimoniale et la nécessité de reproductivilité de ces travaux, ou encore de leur caractère longitudinal : Car toute les données ne nécessitent pas d’être conservées et il est parfois plus sécurisant pour les différents acteurs responsables de ces données de les voir supprimées ! Il pourra y avoir des différences d’appréciation entre les chercheurs et les journalistes, du fait de la nature même de leurs objectifs. SupDPO recommande de visionner ses explications dans la vidéo relative aux principes généraux de l’anonymisation / la pseudonymisation dans les projets de recherche :

Anonymiser ou pseudonymiser des données dans les projets de recherche

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Les échanges ont permis de mettre en évidence les problématiques qui se posent à tous : l’environnement numérique proposé à la recherche dépend de plus en plus d’infrastructure et d’équipement numérique non souverain et/ou dont les réutilisations possibles par les tiers posent de grandes questions de sécurité informatique et/ou juridique et/ou physique et/ou éthique. Les attendus en matière de protection des données sont parfois vécues comme des injonctions contradictoires et souffrent d’un manque de moyens dans les « petits » organismes. Afin de mieux comprendre les risques et les conseils de SupDPO relatives à l’utilisation des services grands publics dans le cadre de la recherche, il est recommandé de visionner la vidéo suivante.

Les plateformes numériques: Manuel des bonnes pratiques
Cette vidéo vous présentera quelques conseils en matière d’’utilisation des plateformes numériques grands publics.

Vidéo #8 – Utilisation des services grands publics dans le cadre de la recherche (21 min) (accès à la vidéo à partir du 03/02/21)

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Les chercheurs ne sont pas seuls : ils doivent pouvoir compter sur les équipes d’accompagnement de la recherche dans les organismes employeurs des chercheurs, qu’il s’agisse des DPO, des RSSI, des Comités d’éthique de la recherche, des ingénieurs de recherche et de documentation, des Directions juridiques, etc.

Les journalistes devraient pouvoir compter sur un équivalent.

La collaboration sur les travaux de procédures de conformité des 2 organismes d’affiliation -structure de l’ESRI ou média- doit être encouragée par le renforcement des moyens des personnels d’accompagnement de la recherche car elle :

  • renforcera le niveau de protection des données personnelles et la conformité dont les responsables de traitement doivent pouvoir justifier à tout instant (principe d’accountability du RGPD),
  • facilitera le quotidien des chercheurs, des journalistes, des DPO et plus largement des personnels d’accompagnement des activités de recherche et journalistique,
  • protègera l’ensemble des personnes concernées.

SupDPO invite les DPO du secteur des médias à y réfléchir ensemble.


Plus d’informations

  1. Plus d’information sur le projet PLACES
  2. La table ronde
    • Modération: Alexandra Caria
    • Intervenant.e.s: Safouane Abdelsalem (journaliste senior editor, Cafebabel.com) et Daniela Trucco (chercheure post-doctorale, Ecole Française de Rome) pour le binôme “Les frontières de l’extrême », en partenariat avec Cafebabel.com
    • Discutant.e.s: Marion Lehmans (Présidente SupDPO et DPO de Sciences Po), Timothée Bonnet (Vice-Président Communication de SupDPO et DPO de Université Sorbonne Paris Nord) et Joachim Dornbusch (Responsable du Pôle numérique recherche, EHESS)
  3. Cycle de séminaires proposés par SupDPO et la Fédération des Comités d’éthique de la recherche (accès à la page dédiée et aux vidéos à partir du 03/02/21)